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Le blog de Martine
30 janvier 2007

Lettre d'amour

Aujourd'hui je voudrais que vous lisiez cette lettre, magnifique, écrite par Olivier Boissard à sa compagne quelques heures avant sa mort le 13 février 1943. Olivier est âgé de 40 ans, vit en Loire Atlantique et il est résistant. J'ai trouvé cette lettre dans un livre "La vie à en mourir" Lettres de fusillés (1941-1944). Je la trouve magnifique.

"Amie Chérie,

Je t'ai aimé tendrement, ma compagne chérie et, dans les heures douloureuses qui ont passé, c'est ton souvenir, le souvenir des heures gaies et pures de notre amour qui m'a réconforté. Oui, c'est la grande chose de ma vie que tu y aies passé, que ton sourire et tendre courage aient enchanté les heures qui ont coulé près de toi. Je le sens encore plus maintenant où je crois que peut être, je ne connaîtrai plus jamais la grande joie de ta présence.
Il faut amour chérie, que tu sois vaillante et brave, à présent que la cruauté des envahisseurs de notre pays nous sépare. Tu as le devoir sacré de ne jamais laisser notre petit chérubin, cette chair de notre chair, sans le réconfort et le guide de ta voix maternelle. Si son papa n'est plus là pour  guider ses pas hésitants vers la vie, notre enfant trouvera près de toi je le sais bien, l'appui qui va lui manquer. Surtout chérie, je voudrais que mon souvenir soit entretenu dans cette jeune tête, qu'il sache que son papa était honnête et droit et que s'il est tombé, c'est pour que tous les petits enfants de France deviennent des hommes libres et fiers de leur pays, pour que la Fraternité humaine habite leur coeur et que disparaissent à jamais la barbarie avec l'égoïsme qui la perpétue.
Chérie, chérie, comme en ces heures douloureuses ton coeur est près de mon coeur ! C'est toi dans les heures dernières qui est dans mon souvenir et alimente mon courage. Je connais ta souffrance, mon pauvre petit, je sais bien que notre séparation est pour toi une chose atroce, mais en souvenir de notre pur amour, il faut, oui, il faut que tu domines notre malheur, que tu sois la femme des jours nouveaux que notre sacrifice amène. Ce n'est pas en vain, je le sais bien, que je fais appel à ton courage, car il va t'en falloir? Je suis certain que tu seras aidée par ta famille, ma soeur et mon frère, qui apporteront pour toi et notre chéri le réconfort et l'appui qui te seront nécessaires. Dis-leur que ma reconnaissance est grande pour ce que je devine qu'ils ont fait et surtout qu'ils feront. Et quand notre enfant sera grand, que tu pourras t'appuyer sur son bras vigoureux, qu'il sache que son papa n'a jamais tremblé devant le sacrifice et la mort, qu'il vous aimait tendrement tous les deux comme savent aimer les hommes honnêtes, mais que si son coeur est écrasé, il est resté jusqu'à l'heure suprême fort et droit. Adieu, adieu, ma bonne chérie, la mort me prend, mais la vie est encore pour toi remplie de choses qui font espérer des jours meilleurs. Alors, laisse la vie te charmer encore quand cela sera possible. Ne m'oublie pas, mais que mon souvenir ne soit jamais un empêchement à ton bonheur, car tu peux encore le retrouver. Si je meurs enchaîné et malheureux c'est que pour toi et les autres soient libres et heureux dans ce monde que je vais quitter. Adieu mon trésor aimé, Je te couvre de baisers, de ces baisers qui sont tout notre amour. Embrassa pour moi souvent notre petit, qu'il grandisse avec le chaud amour que je lui vouais, près de sa maman, et, lorsque des mois, des ans auront passé, garde en toi un petit coin d'où je te parlerai quelquefois, car comme autrefois quand la vie chantait, je reste au seuil du tombeau ton petit Olivier.
Je te remercie ma douce amie, de tout ce que tu m'as fait parvenir pour adoucir un peu les heures dernières ; chaque chose m'a parlé de toi et des miens. J'ai tant souffert dans ces derniers mois que ce fut pour moi presque le paradis de pouvoir manger à ma faim. Sois-en bénie et, en te disant encore adieu, je pense que mon coeur bat fort et crie : je t'aime.
Adieu, amie chérie, adieu !"

Dans ce livre ces hommes font preuve d'un courage absolument extraordinaire. Il est poignant certes, mais plein d'enseignement, plein d'amour, d'abnégation ......


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